7ème dimanche temps ordinaire – Homélie

Homélie du dimanche 22 février 2022

Juste après les Béatitudes, dans l’évangile de Luc, Jésus continue de s’adresser à ses disciples avec ces mots : « Je vous le dis à vous qui m’écoutez ….Aimez vos ennemis … »

Il poursuit en détaillant une série de situations où les disciples, ceux qui l’écoutent sont calomniés, volés, confrontés à des personnes malveillantes, à des ennemis …

Si nous faisons de ces paroles des commandements à suivre à la lettre, des leçons de morale que nous aurions à appliquer sans discernement, je crois qu’on se trouverait devant une mission impossible,  qu’on serait en permanence pris en faute, culpabilisés parce qu’on ne sera pas au top de ces consignes.

 

Et puis, nous avons très honnêtement le droit de réagir quand il nous est dit : «  A celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre joue »

Ces paroles que l’auteur de l’évangile met dans la bouche de Jésus ne sont pas un catéchisme. Elles viennent témoigner de l’incroyable parcours de Jésus qui nous a aimés jusqu’à l’extrême : dans son accueil inconditionnel des pauvres et des pécheurs, dans sa passion pour une fraternité débordant toutes les discriminations, tous les racismes, tous les rejets …jusqu’à la croix et la prière qu’il adresse à son Père :

« Pardonne-les, ils ne savent pas ce qu’ils font ! »

 

J’évoquais fin janvier ces mots de saint Paul qui affirmait : « L’amour ne passera pas ! » en nous posant la question. Est-ce que nous croyons vraiment que l’amour ne passera pas ? Est-ce que nous croyons que la vie aura le dernier mot ? Notre réponse n’est pas une certitude absolue ! L’état du monde, de notre planète, les menaces de guerre, les situations de misère, l’insolence du règne de l’argent, les discours simplistes de haine et de rejet des autres,  viennent nous atteindre en profondeur.

 

D’autant plus fortement quand nous sommes aux prises avec les difficultés du quotidien, avec des tensions et des conflits qui nous éprouvent ...Les paroles de Jésus nous apparaissent comme trop exigeantes, déconcertantes, et même irrecevables !

 

Nous pouvons les recevoir comme celles d’un ami, d’un frère qui vient nous parler d’un Dieu miséricordieux, généreux, compatissant et qui nous invite à nous mettre sur un chemin où la vie, la vie ensemble, le pardon, peuvent avoir leur chance ! « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux »

Notre accueil du message de Jésus prend alors le ton d’une invitation, d’un appel, d’un risque à prendre.

En commençant par interpréter autrement l’appel à tendre l’autre joue. Non pas l’autre joue, dans une attitude de soumission ou de faiblesse mais : une autre joue. Pour sortir de l’engrenage de la vengeance et de la haine. Pour chercher la manière de briser le cycle de la violence, avec ce repère qui est considéré dans la Bible comme la règle d’or : « Ce que vous voulez que les autres fassent pour vous, faites-le aussi pour eux ! » Mais avec la radicalité de Jésus et de son message : pas seulement pour ceux de ma communauté, de mon parti, de ma bande..(T’es pas d’ma bande, chantait Renaud !) mais pour tout humain …

« Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle reconnaissance méritez-vous ? »

 

Seuls ceux et celles qui se sont aventurés sur ce chemin là peuvent nous entraîner, nous encourager, nous guider….

Parmi ceux là, Roselyne Hamel, la sœur de Jacques Hamel, le prêtre assassiné en 2016 à Saint Etienne du Rouvray. Elle a dit ce qu’elle attendait du procès des complices des deux assassins : « On ne veut pas la vengeance, mais la justice et le respect »

Elle veut aussi, dit-elle, écarter : «  la haine qui détruit notre humanité, notre liberté et notre fraternité ».

Elle a noué des relations avec la mère d’un des assaillants :

« Je me suis demandé dans ma prière : qui peut souffrir plus que moi ? Je suis une maman et j’ai eu la réponse. Je n’ai eu de cesse de rencontrer cette mère qui est en souffrance. Nous avons appris à gérer notre douleur toutes les deux. Ma prière a été entendue ». Roselyne demande aussi « d’arrêter d’avoir le mauvais œil sur la communauté musulmane. Le sang humain, quelle que soit notre origine et notre religion n’a qu’une seule couleur »

 

« Face au mal, il faut répondre par le bien : c’est la seule arme qu’on a ! »

 

« Certains ne comprennent pas pourquoi j’ai pardonné …Pourtant être croyant, avoir la foi, c’est ça ! »

 

En nous unissant à Roselyne, à Guy qui a été gravement blessé …. et à tant d’autres victimes de violences de toutes sortes, que les paroles de Jésus fassent leur chemin en chacun d’entre nous.

 

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